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Le Phénomène des Formations et Webinaires pour Devenir Chanvrier : Entre Opportunité et Désillusion

J’en ai vu passer des pubs et des formations en ligne qui vendent du rêve sur la culture du chanvre. "Apprenez à cultiver du CBD en 3 jours !", "Devenez chanvrier rentable dès votre première récolte !" Ça fait sourire, mais surtout, ça me fait lever les yeux au ciel.

Depuis quelques années, le chanvre et ses dérivés connaissent un véritable boom en France et en Europe. Entre les promesses d’un secteur en pleine croissance et la quête d’une reconversion professionnelle « verte » et rentable, de plus en plus de personnes cherchent à se lancer dans la culture du chanvre.

Face à cet engouement, les formations et webinaires pour devenir chanvrier se multiplient, mais sont-ils vraiment une porte d’entrée crédible vers ce métier


La culture du chanvre est un métier agricole comme un autre, avec ses contraintes, ses risques, et une réglementation qui ne laisse aucune place à l’approximation.


Alors pourquoi ces formations se multiplient ? Parce qu’il y a un marché, un engouement… et que ça rapporte bien plus de vendre des webinaires que de cultiver soi-même.


Si vous pensez qu’un webinaire va vous transformer en chanvrier prospère, tu ferais bien de nous lire jusqu'au bout.


Apprendre à cultiver en ligne : une illusion


Les formations en ligne peuvent donner quelques bases utiles : elles permettent de comprendre le cycle de la plante, d’avoir une première approche de la réglementation et d’appréhender les grandes lignes de la culture du chanvre. Mais elles sont loin d’être suffisantes.

Un webinaire ne pourra jamais remplacer le contact direct avec la plante, l’observation des signes de stress, l’adaptation aux variations climatiques ou encore la gestion concrète des aléas du terrain. La culture du chanvre ne se résume pas à semer des graines et attendre que la plante pousse. Il faut être attentif, réactif, savoir ajuster les apports en eau et en nutriments, identifier les signes de maladies avant qu’elles ne ravagent toute une récolte.


C’est un savoir-faire qui ne peut s’acquérir qu’en mettant les mains dans la terre, en expérimentant, en se trompant parfois, mais surtout en apprenant sur le terrain, au contact de personnes qui ont une vraie expérience.



La réglementation : un sujet souvent survolé


Un autre point crucial, souvent minimisé dans ces formations, est la réglementation.

Cultiver du chanvre ne se fait pas librement, et les contraintes légales sont nombreuses. Contrairement à ce que certains laissent entendre, il ne suffit pas de planter et de vendre.

Il existe une liste stricte de variétés autorisées, qui doivent être inscrites au catalogue européen. Toute culture de chanvre doit être déclarée auprès des autorités, et certains producteurs doivent même justifier d’un contrat avec un organisme agréé. Le taux de THC dans les plantes doit impérativement rester sous un seuil légal précis, sous peine de voir toute la récolte détruite.

Ce cadre législatif, en perpétuelle évolution, peut être un véritable casse-tête. Il est essentiel de bien le comprendre avant même de commencer à cultiver. Or, les formations en ligne survolent souvent ces aspects, laissant croire qu’il s’agit d’un détail administratif alors que c’est en réalité l’un des points les plus sensibles du métier.


Un marché bien plus dur qu’on ne le croit


L’un des arguments favoris de ces formations, c’est la rentabilité supposée de la culture du chanvre. On nous parle de marges confortables, de prix de vente alléchants, d’un marché en plein essor. Pourtant, la réalité du terrain est toute autre.

Avec l’explosion de la demande pour le CBD, de nombreux producteurs se sont lancés ces dernières années. Le marché s’est vite retrouvé saturé, et les prix du chanvre brut ont chuté. Aujourd’hui, les industriels et les gros distributeurs imposent des prix extrêmement bas aux petits producteurs, qui peinent à écouler leur production sans vendre à perte.

Dans certains cas, des grossistes achètent du chanvre européen à des prix cassés, bien en dessous du coût réel de production, mettant encore plus en difficulté ceux qui tentent de s’installer localement. Les producteurs qui veulent vendre en direct doivent, quant à eux, affronter d’autres obstacles : une concurrence féroce, des réglementations restrictives et des difficultés à se faire une place sur le marché du détail.

Beaucoup de ceux qui se lancent découvrent rapidement que vendre son chanvre est bien plus compliqué que prévu. Les grandes plateformes censurent le CBD, rendant difficile la promotion et la vente en ligne. Les clients, eux, sont de plus en plus exigeants, et le simple fait d’avoir une bonne qualité de produit ne suffit plus : il faut un vrai réseau, une stratégie marketing solide et une différenciation claire pour espérer s’imposer.



Pourquoi ces formations existent malgré tout ?



Si la culture du chanvre est aussi complexe, pourquoi ces formations continuent-elles de se vendre ? Parce qu’il y a un marché, tout simplement. L’engouement pour le CBD et les produits dérivés du chanvre pousse beaucoup de personnes à chercher des solutions pour se reconvertir ou investir dans ce secteur.

Plutôt que d’apprendre sur le terrain, ce qui demande du temps et de l’engagement, certains préfèrent croire aux raccourcis proposés par ces formations express. Et forcément, des opportunistes ont flairé le filon.

Mais il faut être lucide : ceux qui gagnent vraiment de l’argent ne sont pas les futurs producteurs, mais ceux qui vendent les formations.


Si vous êtes sérieux et que vous souhaitez vraiment vous lancer dans la culture du chanvre, il n’y a pas de mystère : il faut se former correctement, sur le terrain, et construire un projet viable.

La première étape est de rencontrer des producteurs expérimentés. Travailler quelques mois sur une exploitation permet d’apprendre bien plus que n’importe quel webinaire. Observer la culture au fil des saisons, comprendre les défis quotidiens, voir comment se déroule réellement une récolte : c’est une immersion indispensable pour se confronter à la réalité du métier.

Ensuite, il est essentiel de se renseigner en profondeur sur la réglementation. Avant même de penser à planter, il faut connaître les démarches administratives, les obligations légales et anticiper les évolutions potentielles du cadre juridique.

Plutôt que de voir grand dès le début, il vaut mieux commencer avec une petite surface de test.

Expérimenter, comprendre le sol, adapter les méthodes… avant d’envisager une production à plus grande échelle. Ce temps d’apprentissage est crucial pour éviter de faire des erreurs coûteuses.


Enfin, il ne faut pas négliger l’aspect commercial. La culture du chanvre, ce n’est pas juste cultiver et vendre. Il faut penser à son positionnement, à son mode de distribution, aux investissements nécessaires pour transformer ou conditionner ses produits.



Pas de raccourcis pour devenir chanvrier.



Cultiver, transformer et vendre du chanvre, c’est un vrai savoir-faire, qui s’acquiert avec du temps, de l’expérience et une connaissance fine des réalités du marché.

Si vous voulez vraiment vous lancer, prenez le temps de vous former correctement.

Allez sur le terrain, apprenez des professionnels, construisez un projet solide et surtout, ne tombez pas dans le piège des promesses trop belles pour être vraies.




Notre point de vue de con(s)cernés :

Est-ce que je conseillerais ce métier à un ami ?

Non.


Après cinq années passées à cultiver du chanvre, avec des hauts sympas mais des bas très bas, je peux dire que ce métier est loin d’être facile. C’est un travail d’agriculteur, avec tous les inconvénients habituels : des journées à rallonge, une météo parfois cruelle, des investissements lourds, une rentabilité incertaine… et quelques "bonus" bien spécifiques qu’on n’aurait pas si on cultivait des tomates.


La réalité, c’est qu’on exerce dans un pays complètement schizophrène sur le sujet. On nous traite comme des criminels, on nous met des bâtons dans les roues à chaque étape, mais on n’oublie pas de nous taxer comme il faut. La réglementation change tout le temps, souvent au détriment des producteurs, et les contrôles sont légion.


Malgré tout, il y a eu de belles rencontres, et il y en a encore. Mais pour une poignée de passionnés qui essaient vraiment de faire avancer le métier, combien avons-nous croisé de requins, de vendeurs de rêve et d’opportunistes qui ne pensent qu’à nous faire produire toujours plus, sans jamais nous aider à vendre ? Combien de soi-disant "partenaires" qui disparaissent dès qu’il s’agit de parler prix ou engagement sur le long terme ?

Et les assos… Mieux vaut éviter de nous en parler, sous peine de nous entendre devenir vulgaires.


Au final, un métier demande énormément d’énergie, des nuits courtes, pas mal de cheveux blancs en plus et surtout, une tonne d’interrogations sur l’avenir. Un prix élevé, même pour des passionnés.


Alors non, si un ami venait me demander s’il devait se lancer, je ne lui conseillerais pas ce métier. À moins d’avoir le cuir épais, une capacité à encaisser les galères sans broncher et une sacrée dose de patience.

Et encore… Franchement au pire ouvrez une boutique. Mais produire ? En France ? En 2025 ? Nah.



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